Il en est des châteaux où nous ne pouvons en ressortir indemne. Une vraie expérience, une déstabilisation, une sensation étrange de connu et de méconnu qui s’entremêlent pour nous interroger, nous mettre parfois mal à l’aise, nous sortir de notre zone de confort. Une vraie expédition, une claque, quelque chose d’inédit. Voyage au centre de la Renaissance où curiosités riment avec amoncellement d’objets collectionnés durant de nombreux voyages. Revisite de cette période avec notre regard du XXIe siècle. Bienvenue au château d’Oiron où François Ier, Madame de Montespan et le Duc d’Antin traversent les pièces aux ornements riches de dorures, de peintures et de plafonds à caissons ; mais habité dorénavant par des locataires curieux, étranges, interrogatifs.
Construit entre la période Renaissance et le XIXe siècle, ce château présente plusieurs façades et espaces montrant l’évolution architecturale sur quatre siècles : galerie Renaissance, façade à bossage du corps de logis et aile XVIIIe siècle. A l’origine de ce grand dessein, la famille Gouffier, proches des rois François Ier et Henri II, où certains personnages ont été Grand Ecuyer royal en charge de plusieurs dizaines de haras et écuries. Ce château, posé au milieu de nul part, perdu dans la « pampa » aujourd’hui deux-sèvrienne, a mi chemin entre Poitiers, Saumur, Angers, Cholet et Niort, se devait d’en jeter, d’en mettre plein la vue aux différents visiteurs accueillis autrefois dans cette grande demeure.
Aujourd’hui, c’est plus de 60 pièces – sans compter les combles – qui sont ouvertes au public afin de découvrir les nouveaux locataires de ce lieu si improbable, si inédit, si déstabilisant, si frais. Installez-vous confortablement pour cette mise en bouche, qui je l’espère, vous donnera l’envie d’aller y faire un tour pour une plongée au coeur de cette expérience sans précédent. Un véritable site historique où Renaissance, classique et contemporain s’entremêlent avec brio. Déserté totalement courant XXe siècle, un projet fou voit le jour pour sauver ce monument de la ruine. Projet où la volonté de faire renaître l’esprit des cabinets de curiosités fait l’unanimité. Ou comment réinventer les collections, amoncelées autrefois dans ce château, en imaginant de nouvelles avec le concours d’artistes contemporains. 60 pièces, 60 artistes, chacun sa pièce. La seule consigne de commande de chaque oeuvre contemporaine : que chaque artiste fasse résonner son oeuvre avec la pièce qui lui a été octroyée, avec l’histoire du site, l’architecture des lieux, le décor encore présent des époques Renaissance, classique et XVIIIe siècle. Durant votre visite, vous allez croiser Daniel Spoerri, Christian Boltanski, Raoul Marek, Georg Ettl, Sol LeWitt, Thomas Shannon, Charles Ross, Felice Varini et bien d’autres.
Au final, une belle réalisation, qui s’imbrique remarquablement dans cet écrin, en résonance avec le site. Un respect profond des décors anciens, des réalisations contemporaines ayant du sens : en bref un voyage sensationnel !
Pour en savoir + sur l’histoire des lieux et les collections : http://www.chateau-oiron.fr/
Johnatan Savarit