Véritable joyau du Val de Loire, Azay-le-Rideau se révèle être un savant mélange entre un paysage, une architecture et des collections. Ici tout reflète art de la cour à la Renaissance mais également ambiance feutrée des salons du XIXe siècle, où raffinement et panorama se répondent.
Lors de ma visite qui date de 2018, j’avais eu la chance de pouvoir redécouvrir le château à la suite d’une grande campagne de restauration qui s’était échelonnée entre 2014 et 2017. Comme une vraie star, le château s’est refait une beauté afin de sublimer encore plus le visiteur, et pour le coup cela fonctionne bien. Dans son écrin de verdure, entouré de son miroir, du haut de ses grandes façades, il peut s’admirer tel un Narcisse. Cette campagne de restauration est le fruit d’un partenariat conséquent entre le Centre des Monuments Nationaux, entité gérant le château, et le Mobilier National. Cela a permis de répondre aux attentes des publics. Ainsi, parc, toiture/charpentes et collections ont pu être passés aux cribles des spécialistes de la restauration des monuments historiques.
Une vraie redécouverte de ce patrimoine niché au creux de l’Indre au Sud de Tours. Je me suis laissé emporter par les installations oniriques de deux artistes qui ont réinventé le mobilier d’antan, mêlant astucieusement le génie des artistes de la Renaissance comme De Vinci et l’art contemporain. Les artistes Piet.so et Peter Keene ont su réadapter un monde fascinant où des centaines de mécanismes viennent animer des tiroirs de secrétaires, des tasses ou encore des ustensiles sur une table dressée dans la grande salle du château. Ce monde de miniatures a envahi les espaces de visites, s’influençant des nombreuses tapisseries du château pour réinterpréter des robes immenses, des meubles à secrets et des objets enchantés, faisant triompher alors la magie.
L’ameublement du château plonge le visiteur dans une ambiance immersive. La campagne de remeublement qui avait commencé en 2012 vient de s’achever en 2017. Le Mobilier National a fournis 134 pièces au total, transcendant ainsi les espaces. Cette institution a aussi réalisé quelques 19 rideaux afin de redonner du cachet aux différentes chambres, comme celle tressée de jonc de mer sur les murs. Sur le parcours, des salles ont ainsi retrouvé plus d’attraits. C’est le cas de la Dépense, sorte de remise et de lieu de stockage où les mets étaient préparés avant d’être envoyés en cuisine. Batterie en cuivre, mobilier et ustensiles redonnent de la vie à cet espace qui en avait bien besoin.
Mais ce qui frappe le visiteur est bel et bien les extérieurs. Ainsi, à peine sorti du bâtiment d’accueil pour entamer la visite, on s’aperçoit rapidement que la pierre s’est libérée du lichen, cette sorte de mousse proliférant sur les façades à cause de la présence très rapprochée de l’eau. De plus, la restauration a compris la reprise totale des couvertures, où les anciennes ardoises avaient fait leur temps. Il a aussi été question de restaurer les ornementations de toitures : épis, tables de plomb et faîtages ont alors retrouvé leur prestance. De plus, le parc a été totalement repris. Les conservateurs et restaurateurs se sont appuyés sur un plan réalisé par le régisseur du château au milieu du XIXe siècle, afin de redonner du caractère et du sens historique aux paysages environnants le vaisseau de pierre. En se baladant tout autour de ce dernier, on s’imagine dans un vrai décor romantique avec les 5 hectares de parc dans lequel s’installe délicatement son écran d’eau.
Cet édifice, créé en 1119 par le chevalier Ridel, qui n’était au départ qu’une forteresse militaire n’a rien à voir avec le château actuel. Sécurisant la route entre Tours et Chinon, il a été incendié par Charles VII pour déloger les protestants qui s’y cachaient. A la Renaissance, Giles Berthelot et sa femme commencèrent la construction du château actuel. La verticalité est marquée. Le château présente un savant mélange entre la fin gothique et le début Renaissance. L’escalier monumental, véritable vedette, est dû aux artisans italiens. C’est un escalier rampe sur rampe droit avec des paliers – appelés repos à l’époque – et des loggias pour la vue. Il diffère de certains escaliers des châteaux du Val de Loire. Pour apercevoir un autre joyau du château, il faut en effet grimper ces quelques marches.
Au sommet, sous la toiture, se cache la charpente restaurée entre 2014 et 2017. La grande hauteur sous plafond répond à un besoin plutôt basique : le stockage des vivres. Cette charpente date de la Renaissance. Les Berthelot avaient reçu l’autorisation du roi François Ier d’aller couper les chênes de la forêt de Chinon afin de pouvoir chapeauter leur demeure d’Azay-le-Rideau. Ce qui renforce le caractère exceptionnel de ce travail, c’est véritablement l’inscription par l’UNESCO au patrimoine mondial immatériel en 2009 de l’art de tracer les charpentes. Laissez-vous enivrer par l’odeur omniprésente du bois.
Le château d’Azay diamant taillé à facettes serti par l’Indre monté sur des pilotis masqués de fleurs »
Balzac, Le Lys dans la Vallée, 1838
Considéré comme un joyau et « un diamant taillé » comme disait Balzac, Azay-le-Rideau est digne de sa réputation. Un vrai bonheur que de pouvoir naviguer de cale jusqu’au sommet, de bâbord à tribord. Un vrai voyage singulier.
Johnatan Savarit