Le CERCIL, ou le devoir de mémoire de la deuxième guerre mondiale

Histoire singulière qu’est celle des camps de Beaune la Rolande, de Pithiviers et de Jargeau, ces camps d’internement créés et organisés par les autorités françaises à l’aune de l’armistice du 22 juin 1940. Une organisation militaire en vue de la déportation des juifs et des tsiganes. Au total, plus de 4 400 enfants juifs furent d’abord internés dans le Loiret avant d’être envoyés dans des camps allemands pour ne plus jamais revenir.  Suite à la terrible rafle du Vel d’Hiv à l’été 1942, plus de 8 000 personnes y vont être transférées, alors que la capacité des camps du Loiret est de seulement de 3 500 personnes. L’on peut aisément, à l’horreur de la situation, rajouter l’entassement et la promiscuité. A leur arrivée aux camps, on y sépare les mères de leurs enfants.

Dans l’ancienne cour de récréation de l’école maternelle, trônent çà-et-là des pupitres avec des dessins et des citations. Une mise en ambiance forte et terrible à la fois.

Le CERCIL – Centre d’études et de recherche pour les camps d’internet du Loiret – a été créé en 1992 et en 2011 fut inauguré l’espace musée dans une ancienne école maternelle derrière les bâtiments de l’Evêché. L’inauguration s’est faite en présence du Président de la République d’alors, Jacques Chirac et de Simone Veil, personnalité politique incontournable ayant elle-même vécue ces atrocités. Le centre propose une centaine de documents, des milliers de photographies de films et d’émission de radio, des objets fabriqués dans les camps et des bornes audio présentant 21 témoignages.

Un des nombreux témoignages d’expérience de vie (panneau de l’exposition permanente)

Dès sa création, le Cercil souhaite, avec le soutien des deux maires successifs, Jean-Pierre Sueur et Serge Grouard, obtenir des locaux plus adaptés à son action et notamment à l’accueil de public. Ses démarches aboutissent à l’installation, en 2011, au 45 de la rue du Bourdon-Blanc à Orléans, à l’emplacement d’une ancienne école maternelle.

Ici, environ 850m² d’espace pour comprendre l’histoire douloureuse de ces trois camps d’internement du Loiret que sont Beaune, Pithiviers et Jargeau. Un vrai devoir de mémoire pour ne jamais oublié l’horreur nazie et les persécutions envers les Juifs et les Tsiganes.

La mise en place des camps dans le Loiret est la concrétisation physique du régime collaborationniste de Vichy. En effet, Pétain, dès son arrivée au pouvoir, signe le décret du 4 octobre 1940 qui causera par la suite l’internement de « ressortissants étrangers de race juive ». En avril 1941, on voit la création du Commissariat Général aux Questions Juives intensifiant davantage le processus d’internement des Juifs sous la pression allemande. 5 000 d’entre eux seront raflés à Paris et partiront pour les camps du Loiret. Non loin de Paris, ces villes de Beaune, Pithiviers et Jargeau sont desservies par le train. On trouve ici déjà des installations sécurisées qui avaient hébergé des prisonniers de guerre français.  Les baraquements d’accueil ne mesurent chacun que 30m sur 6m. Ils sont faits en bois, peu isolant, munis de deux rangées de lits à deux ou trois étages remplis de paille. Seuls deux poêles à bois sont disséminés pour servir de chauffage. Il n’existe aucune place pour le rangement et très peu d’installations sanitaires et médicales. La nourriture est insuffisante et carencée.

Pour le camp de beaune, on comptait 20 baraquements sur 1.7 hectares pour 1200 internés. Pour le camp de Pithiviers, on avait 17 baraquements sur 3 hectares pour 2000 internes.  

Les internés ne fréquentent en réalité que très peu les Allemands. Ils ne sont présents dans les camps d’internement du Loiret que lors de tournées d’inspection, des déportations vers d’autres camps et lorsqu’ils les Juifs et Tsiganes sont entassés dans les wagons à bestiaux.

De 1942 à 1944, les camps enferment des internés administratifs comme des communistes. En 1943, on ferme le camp de Beaune. Au total, près de 18 000 Juifs y ont été internés avant d’être déportés. Pour la quasi majorité d’entre eux ils disparaissent assassinés dans les camps en Allemagne. Sur les 4 700 enfants internés, 4 400 ont été déportés et seulement 26 adolescents et 14 enfants en reviendront.

A Jargeau, ce sont surtout les Tsiganes qui ont été enfermés. Comble de l’histoire, ce camp n’a été délivré qu’en décembre 1945. Le Gouvernement français a continué d’enfermer des tsiganes plus de 16 mois après le débarquement et la libération progressive de la France.

Dans la cour est implanté un fragment d’une des « baraques », du camp de Beaune-la-Rolande. Il est classé monument historique.

Notre expérience de visite :

C’est malheureusement cette triste et douloureuse histoire que nous vous convions, aujourd’hui, de découvrir ou redécouvrir au travers d’un parcours chronologique au sein des locaux du CERCIL. Ici, une frise replaçant les éléments historiques de l’époque, là, un objet fabriqué ramené des camps, au fond, en décrochant un casque d’écoute, un témoignage plus qu’émouvant, plus loin sur la gauche des photos poignantes et sur notre droite, dans une vitrine, des documents d’époque. Jonchée d’objets didactiques, l’exposition offre une vision intimiste et personnelle de cette période historique. La micro-histoire de certains, qui ont connu l’horreur et la barbarie nazie, au travers d’un parcours qui essaie de dédramatiser le tout en exposant une vérité, celle de ceux qui ont vécu de l’intérieur ces années d’occupation allemande. La parole des victimes reste le fil conducteur de cette exposition que l’on se doit d’aller découvrir pour replacer les choses dans leur contexte, comprendre le passé pour mieux appréhender qui nous sommes aujourd’hui et comment la société française a pu évoluer au fil des décennies. Une histoire qui semble, au final, n’être pas si loin de nous au regard de l’histoire de France. Seulement 70 ans en arrière, nos générations d’avant-nous traversaient alors une crise humaine, humanitaire, sociale, politique et économique en s’embourbant dans un des conflits les plus meurtriers du XXe siècle. La Seconde guerre mondiale tapait à nos portes et abattait sur toute l’Europe un voile noir, un voile obscurcissant alors l’avenir de bien des peuples, sous l’emprise d’un génie du mal, d’un être malfaisant, qui selon une doctrine, allait entraîner sur son chemin que désolation, mort et destruction. Il nous faut revivre spirituellement une telle expérience de vie au travers de ce parcours qui nous est aujourd’hui présenté et des nombreuses vies racontées dans ce musée, afin de comprendre de l’intérieur ce qui s’est passé. Une vision personnelle, singulière, intimiste de plusieurs de ces familles qui nous relatent aujourd’hui, au travers de centaines de documents d’archives, de témoignages vidéo et audio, d’objets fabriqués et de photographies, un parcours de vie traumatisant. Un vrai voyage intérieur, une plongée dans leur histoire, une découverte de l’âme.

Une des nombreuses familles juives internées dans les camps du Loiret avant d’être déportées vers les camps allemands.

La micro-histoire de certains, qui ont connu l’horreur et la barbarie nazie, au travers d’un parcours qui essaie de dédramatiser le tout en exposant une vérité, celle de ceux qui ont vécu de l’intérieur ces années d’occupation allemande. La parole des victimes reste le fil conducteur de cette exposition.

En version PDF, un fichier sur ce sujet en cliquant sur le lien suivant :

Johnatan Savarit

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